La transverbération de Ste Thérèse
Dès qu’elle se présente à nous, c’est d’abord la douleur qui nous vient à l’esprit. La tête rejetée en arrière, les lèvres entrouvertes laissant échapper un râle, les yeux clos, les traits crispés, le drapé du voile qui donne l’impression d’avoir été déchiqueté par les crocs de quelque bête monstrueuse. Puis, au bout de quelques secondes d’observation rapprochée, une espèce de doute s’instille en nous. Au-dessus du corps décharné de l’agonisante se dresse celui potelet d’un chérubin rayonnant d’éxubérance : tandis que sa main gauche saisit un pan du voile de notre jeune et jolie vierge, sa main droite, armée d’une grosse flèche, est sur le point de s’abattre sur ce corps déjà laissé à l’abandon.
Cet acte odieux serait-il accompagné d’un rire satanique ? Que nenni ! Notre angélique meurtrier lance à Thérèse le sourire le plus innocent qui soit.
C’est à ce moment précis - alors que notre regard vient de se poser sur le sourire de l’ange - que toutes les pièces du puzzle s’emboîtent les unes dans les autres pour finaliser l’étonnant tableau et que le doute devient certitude. Thérèse, la sainte, se pâme au septième ciel ! Ce que l’on avait d’abord pris pour de la douleur s’est transformé en jouissance. Tout juste si elle ne nous joue pas la femme fontaine, écartelée qu’elle est sur son nuage de pierre ! Loin d’être un râle de souffrance, c’est bel et bien un « Oui ! » de félicité qu’elle nous souffle. Oui, elle s’est offerte à l’Univers et l’Univers la prise. Oui, c’est par les entrailles que lui fut donné l’illumination ! Décidément, les voies de Dieu sont bien mystérieuses...
Transis devant ses ébats de marbre, c’est donc à notre tour de rester bouche bée et bras ballants.
Artiste | Gian Lorenzo Bernini |
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Date | 1647 - 1652 |
Type | Statue en marbre |
Localisation | Église Santa Maria Della Vittoria de Rome, Rome |