Les saules
la nuit tombée je m’en vais les rejoindre
mes tendres chevelus
empruntant la passerelle mécanique
enjambant l’asphalte mortifère
me voilà auprès d’Eux
dans leur bois
les saules
en vieux amis
ils m’accueillent toujours d’un silence éloquent
de leurs branches menues parcourues de tendresse
ils caressent ma nuque
picotent mon échine
leurs crinières de légèreté feuillue
batifolent à la brise
et bruissent de gaieté chlorophyle
de mélancolie sourde
ils soufflent à mon coeur
leur complainte muette :
les coulées de bitume arrivent à leurs pieds
les vagues de carbone s’abattent sur leurs troncs
les marées de moteurs rugissent jusqu’aux cimes
d’où vient donc le cancer
qui ronge leur beauté ?
où court donc la tumeur
qui bafoue leur sacré ?
saules
du fond de votre éternité
de la vigueur de vos sèves
rafraîchissez leurs fronts
guérissez ces lépreux
vissés à leurs machines
qu’ils en descendent
et retrouvent leur nature
qu’ils en descendent
et retrouvent leurs racines !